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Est-Républicain

13/10/2013

DÉCHETS NUCLÉAIRES À BURE

BERTRAND THUILLIER :
SI UNE ALVÉOLE DEVAIT S’ENFLAMMER COMMENT L’ÉTEINDRE ?

« Tout est réuni pour avoir un incendie. Or, les galeries ne peuvent pas résister correctement plus de deux heures »

Vous avez lu attentivement tous les dossiers de l’Andra publiés en 2005, soit près de 4.000 pages concernant Cigéo. Qu’est-ce qui vous a poussé à le faire ?

J’ai toujours été sensible aux questions concernant l’environnement. J’ai commencé à lire les premières pages par curiosité. J’ai rapidement constaté une distorsion entre ce qui était écrit et le discours de l’Andra. Alors j’ai voulu tout lire. Ça se lit bien, c’est plutôt bien écrit.

Que pensez-vous du projet Cigéo
?

C’est ridicule. On ne connaît rien, on ne sait rien et on veut déjà transformer le laboratoire d’études, alors que nous n’avons pas encore tous les résultats. La modélisation n’est pas encore validée et on ne sait pas comment refermer les alvéoles. Il faut du temps, nous n’avons pas le recul suffisant vis-à-vis de la roche et des colis.

Pour vous, quel serait le plus gros problème
?

L’incendie, clairement. Il y a une accumulation multifactorielle.

Il y aura des colis bitumeux, qui produisent de l’hydrogène, gaz inflammable. La manutention logistique sera basée sur des engins qui utiliseront des batteries haute puissance, qui peuvent avoir des problèmes, ce n’est pas rare. La ventilation est de 500 à 600 m³/s. Tout est réuni pour avoir un incendie.

Or, les galeries ne peuvent pas résister correctement plus de deux heures. C’est l’Andra qui l’écrit. Il y aurait des centaines de km de galeries. Comment voulez-vous l’éteindre en moins de deux heures ? Si une alvéole devait s’enflammer, je ne vois pas comment on pourrait l’éteindre. Dans un incendie de mine, on étouffe le feu. Mais là, avec l’hydrogène, ce ne serait pas possible. Il y aurait aussi un dégagement de contaminant radioactif entraîné par l’hydrogène. Et l’eau pourrait s’infiltrer. Même en refermant l’alvéole ce serait une catastrophe. Si des fumées s’échappent, ce serait une pollution par l’air, et si l’eau s’infiltre, une pollution des sols. Et surtout, il n’existe pas de plan B en cas d’incendie. On ne peut pas récupérer des colis endommagés. La réversibilité est possible quand elle n’est pas nécessaire mais impossible quand elle est indispensable.

Quel est selon vous, le plus gros risque pour les salariés du site ?

L’incendie et le risque d’exposition. Il suffit d’être à proximité d’un colis endommagé pour prendre des doses de radiation. Qui va contrôler la santé des salariés ?

Quels seraient les problèmes pour les riverains ?

Une nuisance continuelle due à la ventilation. En plus, elle rejetterait du gaz radioactif. Même si un filtre THE (très haute efficacité) est posé, il n’empêchera pas les gaz de s’échapper et en cas d’incendie, les filtres brûleraient.

Quelle serait la meilleure solution ?

Il faudrait sécuriser les piscines qui sont à côté des centrales, construire des entrepôts qui tiendraient 200 à 300 ans et laisser le choix aux prochaines générations.

Au début, les déchets radioactifs ont été lancés dans les fosses marines. Aujourd’hui, on ne peut plus les récupérer car les colis sont endommagés. Il n’y a plus de réversibilité possible. Si on les avait laissés dans des entrepôts, on aurait pu en faire quelque chose. Pour Cigéo, c’est pareil.

Propos recueillis par A.G.





Est-Républicain

13/10/2013

DESTRUCTION DES DÉCHETS ?

Plusieurs lecteurs nous ont adressé leurs commentaires sur les réseaux sociaux et sur lerdebatpublic@estrepublicain.fr. Voici leurs questions et avis avec les réponses de l’expert Bertrand Thuillier et de l’Andra.

Destruction des déchets ?
Marcel (Vosges) : « Combien de temps faut-il pour que les déchets soient détruits ? Quel est le risque pour la population ? »

Bertrand Thuillier, ingénieur et expert indépendant :
Les déchets ne seront jamais détruits, et c’est bien cela le problème. Par exemple, l’Iode 129 est un radioélément très présent à Cigéo, sa période est de 15,7 millions d’années, ce qui signifie que sa dangerosité aura diminué de moitié durant cette durée ; il faudrait par conséquent attendre 157 millions d’années pour arriver à un taux de radioactivité divisé par mille environ. C’est pourquoi la solution d’enfouissement reste une solution du siècle dernier où les déchets ménagers partaient souvent dans de nombreuses décharges sauvages avant que l’on ne commence par trier, séparer, extraire et maintenant, grâce à des recherches, valoriser ces déchets.

Fabrice Boissier (directeur de la maîtrise des risques de l’Andra) :
Les déchets destinés à Cigéo resteront dangereux plusieurs centaines de milliers d’années. C’est pourquoi Cigéo est conçu pour contenir cette radioactivité au sein de la couche d’argile, si bien que l’impact de Cigéo restera négligeable même dans plusieurs centaines de milliers d’années. Pour garantir la sûreté de Cigéo durant la période d’exploitation, l’Andra identifie les risques potentiels (incendie, explosion, séisme…) et prévoit les dispositions pour les maîtriser. Par précaution, des situations accidentelles sont également examinées, y compris dans le cas où plusieurs risques se cumuleraient, pour s’assurer que le stockage ne présente pas de risques pour les salariés et les riverains.

Combien d’emplois ?
Dominique (Meuse) : « À temps complet et en plein rendement, combien d’emplois sur le site sont prévus ? En personnel qualifié et autres ? »

Bertrand Thuillier :
Il est nécessaire de prendre du recul vis-à-vis de cette question en considérant également les nombreux emplois qui peuvent être détruits ; est-ce que l’image de la qualité des eaux de Vittel, Contrex et Hépar ne sera pas dégradée, idem pour le tourisme vert, sans parler des pertes d’opportunités en transformant dès maintenant un laboratoire en décharge avant que l’on ait encore les résultats de ce laboratoire : les premiers enfouissements sont prévus en 2025, avant les résultats des tests de scellements (CNE, nov. 2012). Laissons travailler les chercheurs, renforçons ces recherches, et attendons ces résultats ; nous éviterons un appel d’air pour des travailleurs polonais ukrainiens ou roumains enrôlés par un sous-traitant dans le cadre d’un appel d’offres international de creusement.

Fabrice Boissier :
Si Cigéo est autorisé, entre 1.300 et 2.300 personnes travailleront à la construction des premières installations, en plus des activités existantes liées au Laboratoire souterrain (335 personnes actuellement). Après la mise en service du Centre, entre 600 et 1.000 personnes travailleront de manière pérenne sur le site pendant une centaine d’années. Les profils des futurs emplois seront les suivants : ouvriers (50 %), agents de maîtrise, techniciens et employés (20 %), cadres (30 %). L’activité liée à Cigéo générera également des emplois supplémentaires, notamment auprès des fournisseurs locaux, des commerces…

Accompagnement économique justifié ?
Matthieu (Palestine) : « Pourquoi le projet donne lieu à un dispositif d’accompagnement économique, alors que le projet s’accompagnera déjà de la création de nombreux emplois directs et indirects ? Combien d’argent ce dispositif représente-t-il par département ? »

Bertrand Thuillier :
Cet accompagnement est nécessaire car les autres régions approchées ont refusé cette décharge ; il serait plus judicieux de continuer les recherches sur le devenir de ces déchets. Nous ne sommes qu’au début de la connaissance de la structure de la matière, et l’attribution du prix Nobel de physique cette semaine à un Français concernant le bozon de Higgs montre tout le chemin parcouru en quelques décennies, mais également tout le champ de notre ignorance dans ce domaine. Quel pessimisme dans le génie français que de privilégier dès maintenant la transformation d’un laboratoire en décharge.

Fabrice Boissier :
Deux groupements d’intérêt public ont été créés en Meuse et en Haute-Marne, notamment pour mener des actions d’aménagement du territoire et de développement économique. Chacun de ces groupements a reçu 30 millions d’euros en 2012. Ce dispositif a été défini par le Parlement. Le retour d’expérience de plus de 20 ans d’implantation de l’Andra dans l’Aube montre que la présence de centres de stockage participe pleinement à la vie des territoires d’accueil et ne nuit ni à leur image ni à celle des productions locales, mais il est normal que les territoires qui acceptent d’accueillir un projet d’intérêt national bénéficient de contreparties.

Razzia sur les terres agricoles ?
Benoît (Lorraine) :
« Depuis plus de deux ans, l’Andra par l’intermédiaire de la SAFER, met tout en œuvre pour acquérir les terres agricoles et les bois qui se trouvent à plusieurs kilomètres du projet d’enfouissement ! (Des centaines d’hectares ont déjà été achetées) alors pourquoi faire un débat actuellement ? C’est bien la preuve que Cigéo est validé sans avoir consulter la population locale ! »

Bertrand Thuillier :
En effet, des centaines d’hectares ont été déjà acquises : 439,72 ha en Meuse, 350,34 ha en Haute-Marne ; il est également frappant de constater que ces hectares ont été acquis depuis 2008 au prix moyen de 3.869 euros/ha en Meuse, 6.483 euros/ha en Haute-Marne, mais à 11.426 euros/ha dans l’Aube en 2008 et 2012 (Source CLIS du 22.02.2013). Mais c’est également l’Observatoire pérenne de l’environnement, mis en place dès 2007, chargé dans son appel à projet SOERE, de mieux connaître les sources éventuelles de perturbations avec le suivi des concentrations dans l’environnement du chlore 36, du sélénium 79, de l’iode 129, du radium 226, mais également de l’arsenic, du bore et du mercure.

Fabrice Boissier :
La décision de créer Cigéo n’est pas prise aujourd’hui. Le débat public est justement l’opportunité pour chacun de s’exprimer sur le projet. Concernant les acquisitions foncières dont vous parlez, elles sont réalisées par l’Andra pour pouvoir proposer des échanges de terrain et éviter toute expropriation, si le projet devait se faire. Les surfaces nécessaires à Cigéo seraient alors limitées aux installations de surface. Si Cigéo n’était pas mis en œuvre, ces acquisitions pourraient être rétrocédées.

Seulement des robots au fond ?
Baptiste (Isère) :
« Dans la vidéo de présentation de Cigéo, on peut remarquer qu’il n’y a aucune présence humaine sur le site. Est-ce entièrement automatisé ? Et dans ce cas, comment est assurée la maintenance des robots ? »

Bertrand Thuillier :
C’est une bonne observation, les risques et les pannes sont peu présents dans les documents de présentation ; il est noté dans les dossiers Andra – Argile 2009/sûreté p.219 que : « pour certaines situations… La distance de l’intervenant par rapport à la source et le temps d’intervention pourront être utilisés comme mesures de protection ». Les personnes qui font de la maintenance sur machines-outils et sur des lignes de manutention noteront également la pertinence de cette question, a fortiori sur une durée de 100/120 ans, et par voie de conséquence de la dangerosité de ces opérations. On peut également ajouter que l’on ne voit pas non plus les cheminées de 11,5 m de diamètre en sortie des puits d’aération pour évacuer les 500 à 600 m³ d’air par seconde.

Fabrice Boissier :
Les colis de déchets radioactifs seront transférés en souterrain dans des hottes qui feront écran aux radiations émises par les déchets. Ainsi, le personnel pourra circuler dans les galeries souterraines pendant l’exploitation, notamment pour assurer la surveillance de l’installation et la maintenance des équipements. Le transfert des colis sera fait préférentiellement de manière automatisée mais il sera possible, en cas de besoin, de passer en pilotage manuel. Ce mode de fonctionnement est courant dans les installations nucléaires existantes qui manipulent ce type de déchets, à La Hague, Marcoule, Cadarache…




Est-Républicain

13/10/2013

DÉBATS CONTRADICTOIRES SUR INTERNET
LE CALENDRIER (DÉBUT À 19 H)

De 90 minutes, les débats contradictoires thématiques, où un représentant de l’Andra est face à des intervenants indépendants, sont à suivre sur debatpublic-cigeo.org. Il est possible de poser des questions en direct par SMS : envoyez « débat » au 32321, suivi de la question (service gratuit hors coût du SMS). Par mail à question@debatpublic-cigeo.org, via Facebook et Twitter.

Le calendrier (début à 19 h)
Mercredi 16 octobre : Risques et sécurité pour les salariés du site, les citoyens et l’environnement. Mercredi 23 octobre : Les transports de déchets. Mercredi 30 octobre : Transformations locales (population, emploi, éducation, commerce) et aménagements du territoire.

 


 

 

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